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Publié le 14 novembre 2024
Une source proche du dossier a indiqué jeudi à l'AFP que Mme Elimas serait jugée le 31 mars pour ce harcèlement moral dénoncé alors qu'elle était en charge de l'Education prioritaire.
Sollicité, le parquet de Paris a confirmé cette audience qui portera sur des suspicions de "propos vexatoires et humiliants, des injonctions contradictoires, des critiques sur leurs compétences professionnelles, le tout intervenant après un bref état de grâce".
L'actuelle conseillère régionale en Île-de-France (bloc présidentiel), qui avait démissionné en mars 2022 après des informations publiées par l'AFP sur le dossier, n'a pas souhaité réagir dans l'immédiat, pas plus que son avocat Benoît Derieux.
D'après le parquet, les membres de son cabinet concernés par le dossier, "pour l'essentiel les conseillers communication qui se sont succédé auprès d'elle", ont dénoncé ces faits datant de juillet 2020 à mars 2022, qui font encourir à cette ex-membre du gouvernement deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende.
Pour l'une des victimes présumées, le parquet note par exemple qu'elle se voyait "imposer des tâches" relevant d'autres fonctions, "une large amplitude horaire", un "dénigrement parfois public sur ses compétences professionnelles", "des injonctions contradictoires et des demandes implicites suivies de reproches".
Le parquet souligne aussi la "multiplication de reproches infondés et de remarques blessantes" sur la vie personnelle ou le travail de l'ex-membre du cabinet, "tels un usage excessif des taxis, ses horaires de travail pourtant aménagés, ses absences du ministère le week-end", pointant au final une volonté d'isolement.
Chez d'autres ex-conseillers ou ex-conseillères, le parquet pointe aussi les "propos vexatoires et humiliants, parfois publics", "l'isolement", "l'infantilisation", le "dénigrement", etc.
Sollicités, plusieurs de ces ex-conseillers et conseillères ont demandé l'anonymat avant de réagir, tandis que d'autres n'ont pas souhaité s'exprimer.
Pour l'une de ces victimes présumées, "qu'il y ait désormais une date d'audience montre que la justice s'est saisie efficacement de ces faits graves de harcèlement moral, et qu'elle avance. Il y a une forme de soulagement, même s'il ne pourra être entier que lorsque nous serons pleinement et définitivement reconnus comme victimes".
Pour une autre, "la tenue de ce procès témoigne peut-être d'une prise de conscience sur cette réalité du harcèlement, qui peut avoir lieu dans toutes les strates de la société".
Une troisième éventuelle victime identifiée par la justice "espère que des réponses et des réparations seront apportées".
Cette personne souhaite que "cette procédure permette de progresser sur la gestion des ressources humaines dans les milieux professionnels élitistes -pas que les cabinets ministériels- où il y a une forte pression, pas de contrepoids, et d'expliciter la frontière entre ce qui relève de l'exigence et ce qui relève du harcèlement".
L'AFP avait révélé mi-janvier 2022 que Mme Elimas faisait l'objet d'une enquête administrative de l'Inspection générale de l'enseignement supérieur et de la recherche, après des signalements internes quant à des "dysfonctionnements" au sein de son cabinet relatifs "aux relations de travail".
Cette procédure avait débouché sur un signalement au parquet de Paris qui avait ouvert une enquête pénale confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne.
Au moins trois sources avaient aussi dénoncé l'emploi au sein du cabinet de Mme Elimas d'un très proche, décrit par l'une de ces sources comme "intouchable".
Cette membre du gouvernement de Jean Castex s'était dite "victime d'une attaque de grande violence".
Une semaine après son départ du gouvernement, Mme Elimas avait annoncé avoir porté plainte pour dénonciation calomnieuse.
Âgée de 51 ans, enseignante de profession, Nathalie Elimas était entrée au gouvernement en juillet 2020 après avoir été élue en 2017 députée MoDem (majorité présidentielle) du Val-d'Oise.